On y est! 2024 est là. Portés par la vague du renouveau calendaire et poussés par la pression sociale et la tradition, nous allons pour beaucoup d’entre nous nous prêter à l’exercice de la liste des résolutions pour la nouvelle année. Et, pour beaucoup d’entre nous, la motivation va s’essoufler et disparaître. Plus ou moins rapidement, nos beaux objectifs vont tomber dans les oubliettes, rejoignant ceux de 2023, 2022, 2021, etc., emmenant avec eux un petit morceau d’estime de soi. Alors comment éviter d’en arriver là une fois de plus ?
Faire l’impasse?
Le meilleur moyen de s’assurer de ne pas échouer est de ne pas prendre de résolutions du tout. Ca semble évident en théorie mais dans la pratique ce n’est pas toujours si simple. En effet, les résolutions du nouvel an correspondent à une pratique ancrée dans nos habitudes depuis très longtemps.
La tradition remonte à l’époque des Babyloniens, il y a environ 4 000 ans. A l’époque, on parlait d’engagements pour la nouvelle année, qui commençait alors à la mi-mars. La Rome antique perpétua ensuite la tradition de la célébration du Nouvel An (toujours à la mi-mars avec la fête d’Anna Perenna, déesse de la nouvelle année et du début du printemps) et des promesses qui l’accompagnaient. C’est Jules César, en 46 av. J.-C., qui instaura le premier le 1er janvier comme début de la nouvelle année. Cette date permettait d’honorer le dieu romain Janus, dieu aux deux visages, l’un tourné vers le passé, l’autre vers l’avenir et les nouveaux départs.

Au Moyen Âge, la nouvelle année était l’occasion pour les chevaliers de renouveler leur allégence et leurs vœux de chevalerie. Il faudra attendre Charles IX et l’édit de Roussillon en 1564 pour que le 1er janvier soit officiellement adopté comme premier jour de la nouvelle année en France. En 1582, le calendrier grégorien fut instauré et le commencement de la nouvelle année au 1er janvier devint la règle dans tout le monde catholique. Sous l’influence sociale et culturelle de la religion, la fonction des vœux de Nouvel An a continué de se transmettre. A partir du XIXème siècle, les résolutions ont commencé à être moquées et à perdre leur caractère sacré. Malgré tout, les résolutions ont résisté à l’épreuve du temps et la nouvelle année reste un symbole de nouveau départ auquel il est difficile d’échapper.
Top 10 des résolutions
Les objectifs les plus couramment retrouvés sont:
- Perdre du poids
- Arrêter de fumer
- Apprendre une nouvelle compétence
- Manger mieux
- Régler ses problèmes d’argent
- Passer plus de temps en famille
- Passer moins de temps sur les réseaux/devant les écrans
- Voyager
- Faire du bénévolat
- Mieux dormir
En 1988, une étude a montré que 77% des personnes ne tiennent leurs résolutions qu’une semaine, 55% un mois et 19% deux ans (Norcross & Vangarelli, 1988). Le taux d’échec est probablement sous-estimé, l’auto-évaluation étant vulnérable à la désirabilité sociale (Koestner & al., 2008). Ces statistiques nous amènent à essayer de comprendre pourquoi les gens « échouent » à tenir leurs promesses et comment essayer d’enrayer l’épidémie d’abandon.
Promesses tenues!
L’une des premières clés est la précision. Votre résolution est-elle claire, précise ou reste-t-elle floue? « En 2024, je vais bouger plus » est une résolution obscure qui aura peu de chance de déboucher sur un réel changement. A l’inverse, « en 2024, je vais courir au moins deux fois semaine avec pour objectif final au bout d’un an de m’inscrire à un 15k » est plus nette et par conséquent plus viable.
Un autre élement pour augmenter ses chances d’atteindre son but résiderait dans la formulation de ses résolutions. Cette idée est soutenue par les résultats d’une étude qui montre la plus grande efficacité des formulation positives (Oscarsson & al., 2020). Plus précisément, les personnes qui formulent des résolutions de manière positive, c’est à dire en exprimant ce qu’elles veulent faire plutôt que ce qu’elles tentent d’éviter, ont plus de chances de s’y tenir. Par exemple, il vaut mieux se dire « je vais commencer à aller à la gym » plutôt que « je vais arrêter de glander dans mon canapé ». Autre exemple, si votre objectif est de perdre un peu de poids, il est plus efficace de déclarer « je vais manger deux fruits par jour » plutôt que « je vais désormais éviter les sucreries ». Ici, on remplace un comportement « mauvais » par un autre plus sain. L’idée sous-jacente est que l’être-humain ne peut pas désapprendre un comportement (vous avez déjà essayé de désapprendre à faire du vélo?). Par contre, il peut en apprendre un nouveau! A noter que le type de soutien dont les participants à l’étude ont bénéficié n’a pas eu beaucoup d’influence. Pas d’excuse donc si votre entourage ne vous encourage pas plus que ça…
Une autre étude montre l’importance de relier la résolution à des besoins psychologiques fondamentaux (Bradshaw & al., 2021). Ainsi, une résolution sera plus facilement tenue si elle touche directement un besoin fondamental. Ces besoins ont été hierarchisés par Maslow dans les années 1940:

L’idée ici est qu’un objectif aura plus de chance d’être atteint s’il correspond à un besoin plutôt qu’à un désir ou motivé par une peur. Ainsi, il est important, au-delà de l’intention, de vérifier l’origine de sa motivation. Par exemple si ma résolution est d’arrêter de fumer (super bonne intention) mais que je suis motivé(e) par la peur de développer un cancer du poumon ou par crainte que mon partenaire me quitte si je continue de fumer, le risque d’échec est plus grand. En effet, ma décision n’est pas motivée par un besoin personnel mais par un facteur extérieur. Les peurs sont parfois inconscientes, essayez d’être radicalement honnête avec vous-même quand vous questionnez vos motivations (est-ce que je veux vraiment maigrir pour moi ou est-ce que tout au fond j’ai peur qu’on me rejette si je ne suis pas mince?). Attention aussi aux résolutions partagées du type « je le fais si tu le fais ». Là aussi, la motivation risque de vaciller si elle s’appuie en partie sur quelqu’un d’autre. Si vous décidez d’une résolution commune avec une autre personne soyez clair(e) dès le départ sur ce que vous ferez si l’autre change d’avis ou abandonne en cours de route.
Les résolutions nécessitent de la discipline et pour être discipliné(e) il faut savoir être réaliste (objectif atteignable) mais aussi flexible. Si ma résolution est d’être en meilleure forme physique et pour se faire d’aller à la gym, je vais devoir intégrer la ou les séances de gym dans mon emploi du temps de manière à en faire une habitude, une règle de vie. En fonction de mes occupations, professionnelles et personnelles, je vais choisir un nombre de séances qui soit raisonnable et m’y tenir. Néanmoins, il faut aussi se donner le droit de déroger parfois à cette règle, sans culpabiliser. Une personne disciplinée saura ne pas trop dévier de son plan initial ou sera capable de modifier ce plan initial et de s’adapter aux circonstances qu’elle ne contrôle pas.
Enfin, récompensez-vous! Pensez à la récompense finale, quand le résultat sera atteint mais réflechissez aussi aux petites gratifications intermédiaires. Elles ne sont pas forcément matérielles, il peut s’agir de félicitations faites à soi-même.
Bonne année à tous et bonnes résolutions!

Bibliographie
Bradshaw, E. L., Sahdra, B. K., Ciarrochi, J., Parker, P. D., Martos, T., & Ryan, R. M. (2021). A configural approach to aspirations: The social breadth of aspiration profiles predicts well-being over and above the intrinsic and extrinsic aspirations that comprise the profiles. Journal of personality and social psychology, 120(1), 226.
Koestner, R., Otis, N., Powers, T. A., Pelletier, L., & Gagnon, H. (2008). Autonomous motivation, controlled motivation, and goal progress. Journal of personality, 76(5), 1201-1230.
Norcross, J. C., & Vangarelli, D. J. (1988). The resolution solution: Longitudinal examination of New Year’s change attempts. Journal of substance abuse, 1(2), 127-134.
Oscarsson, M., Carlbring, P., Andersson, G., & Rozental, A. (2020). A large-scale experiment on New Year’s resolutions: Approach-oriented goals are more successful than avoidance-oriented goals. PLoS One, 15(12), e0234097.